 rian De
Palma est né
le 11 septembre 1940 à Newark dans le New Jersey, dans une famille de
trois fils. Son frère
aîné, Bruce, extrêmement influent, mourra dans les années 90. Le jeune Brian
cultive
très tôt une passion pour la physique dont il décide de faire sa
spécialité. Adolescent surdoué, il est fasciné par l'astronomie et fan
de
films de science-fiction. Il conçoit lui-même des ordinateurs
et reçoit à dix-sept ans une médaille
d'or pour une thèse sur "L'application
de la cybernétique à la résolution d'équations différentielles". Ses
parents sont en froid. Son père, chirurgien-orthopédiste, trompe sa
femme avec une infirmière, et sa mère n'a pas suffisamment de courage
pour le quitter. Elle tente même d'avaler une boite entière de
barbituriques et Brian est obligé de la conduire à l'hôpital. Muni d'un
appareil photographique, le jeune Brian décide de suivre son père et
prend des clichés de lui dans les bras de l'autre femme. Il obtient ainsi le divorce de ses parents. De
Palma entre à l'Université Columbia de New York, dans le but d'achever
sa formation et de devenir astrophysicien, mais à dix-huit ans, il est fortement marqué par la vision de
Vertigo d'Alfred Hitchcock.
Brian laisse tomber la physique et se consacre alors pour le théâtre, puis le
cinéma.
En
1960, il réalise son premier moyen métrage: Icarus, suivi de
6601224,
The Story of An IBM Card et Woton's Wake, pour lequel il remporte
plusieurs prix. Au cours de ses études au Sarah Lawrence College, De
Palma aborde le long-métrage avec The Wedding Party, comédie
semi-improvisée qui marque les débuts à l'écran de Robert De Niro et
Jill Clayburgh. Après ce premier essai, il poursuit son apprentissage
sur divers documentaires et courts métrages dont The Responsive
Eye
consacré à une exposition d'Op Art au Musée d'Art Moderne de New
York. En 1967, il
revient au long métrage avec Murder a la Mod, thriller sophistiqué émaillé
de références hitchcockiennes. L'euphorie
contestataire des années soixante inspire De Palma. Se questionnant
finalement sur les paradoxes artificiels de la société américaine et
l'absurdité de la guerre du Vietnam, il réalise les comédies
satiriques Greetings (Ours d'Argent au Festival de Berlin) et Hi!
Mom,
qui l'imposent parmi les jeunes talents de la Nouvelle Vague américaine.
Entre-temps, il réalise Dyonisus in '69, film-documentaire sur un
happening filmé en écran partagé, technique qu'il reprendra dans
plusieurs de ses films.
Vite
considéré comme une légende parmi les cinéastes new-yorkais
indépendants, De Palma se voit offrir des projets plus importants par de
grands studios hollywoodiens qui commencent alors à s'intéresser à
lui. On lui propose une comédie, Get to Know Your Rabbit, qu'il
réalise en 1971 avec
Tom Smothers, Katharine Ross et Orson Welles. Mais les relations avec
les producteurs sont conflictuelles et De Palma est viré avant le
montage. Il se change les idées en s'installant avec le futur
"Nouvel Hollywood" (Lucas, Scorsese, Spielberg, Schrader...)
à Los Angeles, dans la maison des actrices Jennifer Salt et Margot
Kidder. À Noël, il leur offre un scénario qu'il a écrit pour elles, Sisters,
qu'il tourne en 1973. Rompant avec le style semi-improvisé de ses
précédents films, il affirme avec ce film d'exceptionnelles qualités d'écriture,
un sens de la construction, du cadrage et du rythme digne des meilleurs
réalisateurs hollywoodiens. La consécration artistique arrivera deux ans après ce coup de maître,
lorsqu'il signe le thriller musical Phantom of the Paradise, qui remporte en
1975 le Grand Prix du Festival d'Avoriaz. En 1976, il écrit et réalise
Obsession, thriller romantique interprété
par Cliff Robertson et Geneviève Bujold, où il rend un bel hommage à
Hitchcock. Il porte à l'écran le premier roman de Stephen King, Carrie.
C'est un triomphe international qui vaut une nomination à l'Oscar
pour Sissy Spacek et Piper Laurie. Le film révèle Nancy Allen,
John Travolta et Amy Irving et restera l'une des plus brillantes
transpositions de l'œuvre de Stephen King. Sa célèbre séquence
finale et certains de ses procédés ont été depuis largement imités.
En
1977, De Palma dirige Kirk Douglas, John Cassavetes et Amy Irving
dans The Fury, film d'espionnage mêlant occultisme et politique-fiction. En
1978, il réalise Home Movies, avec Kirk
Douglas et Nancy Allen, et le concours de ses étudiants en cinéma de
Sarah Lawrence College. Cette comédie semi-autobiographique retrace
directement ses propres aventures d'adolescent quand il espionnait son père. Dans
les années 80, il a une réputation
d'affreux jojo du cinéma US avec des films provocateurs où les meurtres au
rasoir, à la perceuse ou à la tronçonneuse et les perversions sexuelles
gratinées scandaliseront et lui vaudront quelques démêlés avec les
féministes. Ce sera le cas notamment avec
Dressed to Kill qu'il réalise en
1980, interprété par Michael Caine et Angie Dickinson, qui est
considéré aujourd'hui comme l'une des grandes réussites de sa
carrière, tout comme Blow Out qu'il écrit et met en scène en
1981, hommage à sa façon au Blow Up d'Antonioni. Il explore avec
ces deux films deux thèmes dominants de son œuvre: voyeurisme
et manipulation. Mais le public n'est pas toujours au rendez-vous. En 1982, Brian De Palma réalise une nouvelle
version
baroque et hyper-violente de Scarface sur un scénario d'Oliver Stone
d'après celui d'Howard Hawks et Ben Hecht. On y découvre un Al Pacino
grandiose, psychopathe et cocaïné jusqu'aux tréfonds des sinus, et le
film révèle Michelle Pfeiffer. En 1984, De Palma signe Body Double qui
offre son premier grand rôle à Melanie Griffith dans un dernier
thriller-hommage à Hitchcock. Abandonnant temporairement ce genre
qui a fait sa réputation, il réalise The Untouchables, d'après la
célèbre série télévisée. Marquant le début d'une collaboration de
De Palma avec Ennio Morricone pour encore deux films, le film vaudra l'Oscar à Sean Connery et
lancera simultanément Kevin Costner et Andy Garcia. Grâce au succès
du films, il peut se permettre de réaliser un sujet plus sensible et
qu'il a toujours voulu porter à l'écran: l'histoire vraie du viol d'une
jeune fille par des soldats américains pendant la guerre du Vietnam. Il dirige
ainsi Michael J. Fox à contre-emploi dans Casualties of War avec
également Sean Penn. Le film a bonne critique mais ne marche pas. En
1990, il adapte le roman de Tom Wolfe The Bonfire of the Vanities avec
Tom Hanks, Melanie Griffith et Bruce Willis, mais le film ne sera
qu'un gros fiasco financier et critique, le plus difficile de la carrière
de De Palma.
Il
reste néanmoins créatif et s'est alors risqué à de nouvelles
expériences toujours impressionnantes du point de vue artistique, retournant
au thriller en 1992 avec Raising Cain qu'interprètent John Lithgow et
Lolita Davidovitch, ou dirigeant Al Pacino dans ce qui est considéré comme
l'un des meilleurs polars des années 90, Carlito's Way,
racontant le destin inexorable d'un ancien trafiquant repenti. Mais
c'est en 1996, avec Mission: impossible, réunissant Tom Cruise, Jon Voight, Emmanuelle Béart et Jean Réno,
que De Palma connaîtra un succès international (son plus gros à ce
jour). Cette adaptation plutôt libre d'après la série culte sera suivie du thriller
Snake Eyes, interprété par Nicolas Cage et Gary
Sinise, dont le premier plan est impressionnant de virtuosité. Puis, en
2000, sort son premier film de science-fiction: Mission to Mars, interprété
par Gary Sinise, Tim Robbins, Don Cheadle et Connie Nielsen. Le film est
descendu par la critique et le public ne suit pas. De Palma s'installe
en France, parcours Paris en mobylette et décide d'y tourner un film
sur les mésaventures d'une manipulatrice. Marquant son retour au
thriller érotique, ce sera Femme Fatale, sorti
en 2002, avec Rebecca Romijn et Antonio Banderas, démarrant sur un audacieux vol de bijoux au Palais des Festivals de
Cannes.
En
2005, Brian De Palma réalise The Black Dahlia d'après le roman de James Ellroy
et réunit pour l'occasion Josh Hartnett, Scarlett Johansson, Hilary
Swank et Aaron Eckhart. Le succès est mitigé. Son dernier film, Redacted,
sur la vie de soldats américains dans la guerre en Iraq, De Palma
retrouve le style de ses débuts où il dénonçait la guerre du Vietnam,
et refait parler de lui dans les médias américains scandalisés. Il
décroche le Lion d'Argent du meilleur réalisateur au festival de Venise.
Avec The Boston Stranglers, son prochain projet qu'il
tournera au printemps prochain, Brian De Palma montre, après
quarante-cinq ans de carrière, que son désir de faire du cinéma
reste intact.
Romain
Desbiens
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